Comment choisir un livre de boulangerie
En préambule, il est important de savoir qu’il existe en langue française plusieurs centaines de livres concernant le pain. Avant d’envisager un achat vous pouvez les consulter en bibliothèque. En France le Dépôt légal permet en principe d’avoir en bibliothèque la totalité des ouvrages publiés dans le pays. Je recommande l’achat des farines auprès des moulins je recommande l’achat de livres auprès des librairies.
– auteur Le prestige de l’auteur fait vendre, en particulier si s’il s’agit d’un MOF. Cependant il faut garder en mémoire que tous les bons boulangers ne sont pas des MOF, ce concours étant très exigeant. Par ailleurs, un boulanger, même de haut niveau, n’est pas forcément à l’aise dans l’écriture. Il est donc important de déterminer à quel public s’adresse le livre
– collection Une collection a un côté rassurant, parfois trompeur. Tous les titres d’une collection n’ont pas forcément la même valeur
– éditeur Dans le domaine culinaire, certains éditeur dominent le marché (Marabout en France). Cet état de fait lui permet, et même l’oblige, à publier beaucoup de livres. Il y en a de bons et de mauvais
– prix du livre Le prix ne fait pas la qualité, les critères ci-dessus sont à prendre en considération en premier lieu. Par contre il est préférable d’avoir un livre à 50 € dont vous faites les recettes régulièrement que 10 livres à 10 € dont vous faites parfois une recette
– contenu Plusieurs notions doivent figurer et être expliquées dans un livre de recettes de pain :
- matériel minimum à posséder
- classification et utilisations des farines en fonction aussi de la mouture
- utilisation de l’eau (taux d’hydratation)
- sel à utiliser (sel fin ou de mer)
- ferment à utiliser, avec leurs propriétés
- température de base (somme des températures de la farine, du fournil et de l’eau, éventuellement du ferment) en fonction de la recette
– niveau Quel que soit notre niveau, le but est de réaliser un pain qui fasse plaisir, tant à réaliser qu’à manger, outre les aspects diététiques que je n’aborde pas ici. Rater une brioche coûte plus cher que réussir une simple baguette. Les livres permettent de progresser dans la mesure où ils sont utilisés. Enfin, les livres de cuisine ne doivent pas obligatoirement être parsemés de taches de graisses. Il n’y a pas lieu de prouver qu’ils sont utilisés et il est facile de les protéger (papier film) en cuisine
– origine du livre La plupart des ouvrages sont français. La classification des farines (T suivi d’un numéro) n’est pas la même qu’en Suisse, en Allemagne, Italie, etc.
– livres traduits Certains pains et procédés de panification ne sont pas les mêmes dans tous les pays, de même que les farines. Par exemple, aux Etats-Unis, il est difficile de trouver de la farine de seigle de la même qualité qu’en Allemagne. De plus, la traduction peut poser problème si elle n’est pas vérifiée par un professionnel de langue française (le blé hard / soft n’est pas en français le blé dur / tendre) et la confusion est possible
– recettes Les recettes doivent être compréhensibles. Cela peut faire sourire, mais dans certains livres le vocabulaire professionnel utilisé n’est pas toujours clair. Si un amateur qui débute lit la phrase : «pétrir sur poolish de moitié, pointer, rabattre, bouler et apprêter avant de façonner, fleurer et scarifier à l’aide d’une grignette» il n’est pas évident qu’il comprenne. Le vocabulaire professionnel doit être expliqué, du moins les termes les plus courants. La présentation d’une recette a un rôle primordial. Elle doit être lisible facilement et présentée dans l’ordre chronologique des opérations. Il est également utile qu’elle mentionne les phases lors desquelles le boulanger est actif (pétrissage par exemple) ou non (cuisson par exemple). Privilégiez un livre contenant un glossaire des termes techniques utilisés ou ayez également un livre contenant ces termes. Faites attention aux anciens livres, les taux de sel et de ferment ont changé. Le sel par exemple était interdit à certaines époques. Il était parfois très cher et donc peu utilisé. En général, les livres indiquent comment pétrir au pétrin, vérifiez que le pétrissage manuel soit détaillé
– illustrations Une remarque d’une libraire à une cliente : les bons livres de cuisine n’ont pas d’illustrations ! Ne vous fiez pas à ce genre de jugement qui est totalement faux et dénué d’un quelconque fondement. Il existe plusieurs livres techniques détaillant les gestes, p. ex. le pétrissage, et les illustrations sont indispensables. Cela n’en fait pas de mauvais livres pour autant. Fiez-vous plutôt à votre propre compréhension
– ingrédients Je conseille de commencer par des livres détaillant les recettes de froment ([blé tendre Triticum aestivum]). A garder cependant en mémoire que les farines ont pu changer, par exemple le taux de protéines qui va déterminer la force du gluten, et que certains blés ne sont plus utilisés. Les autres céréales peuvent nécessiter d’autres techniques pour lesquelles les bases restent indispensables. Si la possibilité existe, achetez vos farines dans un petit moulin artisanal disposant de meules de pierre ou chez un paysan-boulanger. Vous pouvez également demander à votre boulanger. Les meuniers seront certainement enchantés de vous présenter les installations et les méthodes de mouture
– ustensiles Tout est trouvable, mais ici aussi la question à se poser est double : est-ce que j’ai les ustensiles nécessaires ? en cas d’achat, est-ce que je vais les utiliser régulièrement ? Il existe des fours à bois en pièces détachées à monter soi-même. Mais il faut une certaine quantité de pain pour qu’un tel four vaille la peine. Par ailleurs, la cuisson étant réalisée par la chaleur résiduelle, un petit four pèse environ 400 kilos. Un four électrique peut facilement être équipé d’une pierre réfractaire coûtant quelques euros. Les fours actuels ont parfois une grille évacuant l’humidité alors qu’il faut de l’humidité pour cuire le pain. Faut-il acheter un 2e four ou cuire le pain en cocotte ? Cette dernière solution fonctionne bien, mais restreint les possibilités de formes et de taille, à moins d’avoir plusieurs cocottes. Tout le monde n’a pas de pétrin. Les robots, aussi jolis soient-il, sont équipé d’un crochet qui, selon son profil, peut déchirer le réseau de gluten
– internet Un paradoxe : toute recette, ou presque, peut être trouvée. N’importe qui peut publier n’importe quelle recette. Avec un peu d’habitude culinaire, on repère rapidement les sites sérieux.
– Erreurs fréquentes contenues dans les livres de boulangerie
- Mélanger la levure à de l’eau tiède
- Ajoutez 3 décilitres d’eau
- Mettez un plat d’eau au fond du four
- Scarifiez à l’aide d’un couteau
- Cuire sur une plaque à gâteau
- Dégazez la pâte en tapant avec le poing
- Le chlore de l’eau du robinet empêche de réaliser du levain. Utilisez de l’eau de source
- A partir de quelle température l’eau n’est-elle plus froide pour être tiède et plus tiède pour être chaude ? La température doit être indiquée.
- Indication manquant de précision, l’eau, comme tous les ingrédients, doit être pesée, c’est beaucoup plus précis.
- En général, le pain enfourné a besoin d’humidité lors de l’enfournement, le «coup de buée» mais plus par la suite.
- Un couteau n’est pas assez fin et souvent pas assez aiguisé. Les lames de boulangers ne sont pas très chères mais très efficaces.
- La plaque refroidit dès la dépose du pain et elle doit revenir à température. Pendant ce temps, la croûte commence déjà à se former.
- Il n’y a pas de raison de maltraiter la pâte.
- Un laboratoire a testé le levain à l’eau de piscine et il a obtenu le même volume de levain. Espérons qu’il n’a pas cuit et mangé de pain avec ce levain… De quelle source ? Est-ce qu’elle est surveillée d’un point de vue sanitaire ?
O. Ducommun / Libraire retraité / www.mitron.ch